Un peu d’Histoire

Extrait  du livre « ART BOSSERVILLE Saint-Phlin  – Village de Meurthe de Robert Furgaux » Livre offert à la commune par Paul MANGIN, ancien adjoint à la commune d’Art sur Meurthe. Nos remerciements.   Art-sur-Meurthe : « Beau village sur le bord droit de la rivière » écrivait Durival en 1779 (1) . Le médecin lui faisant écho, disant, en 1838, à propos du choléra qui avait totalement épargné le village en raison d’une hygiène en avance sur son temps : Art-sur-Meurthe est un des plus beaux villages du canton de Saint-Nicolas-de-Port » (2) « Joli village de l’ancien duché de Lorraine, sur la rive droite de la Meurthe » notait enfin Lepage en 1843 (3).  
1.Description de la Lorraine et du Barrois, t.III, p 17
2.Lallement. Bulletin paroissial
3.Département de la Meurthe, p 28

ART-SUR-MEURTHE

Le pont de la rivière Meurthe
L’origine d’Art-sur-Meurthe tient vraisemblablement à un pont, d’où le non d’Arc (arche) qui fut jadis donné à la localité. Ce fut, en effet, pendant des siècles, le seul endroit où existait un ouvrage sur la Meurthe entre Port (dénommé aujourd’hui Saint-Nicolas-de-Port) et Essey. Mais il y avait, ici et là, et ce jusqu’au XXe siècle, avant que le lit ne fût creusé par les sablières, d’autres moyens de traverser : des gués et des bacs. Au début du XIXe siècle, il y avait, de Saint-Phlin à Nancy, trois bacs : un à Art, un à Bosseville, un à Tomblaine (4) Paradoxalement, le lieu qui doit son existence et son nom à un pont, fut dépourvu de pont pendant au moins trois siècles. ……La traversée s’effectuait donc en bateau……. C’est en 1880 que l’on commence à parler d’un pont : l’initiative en revient au maire Rollin, mais c’est son successeur, Chrestien de Beauminy, qui allait réaliser le projet en 1881…….. …….restons-y pour signaler d’autres souvrages. Sur la Meurthe toujours, un pont canal édifié sous Saint-Phlin en 1848, lors du creusement du canal et de la pose du chemin de fer (4). Sur le ruisseau des étangs à Monrepentir, un très vieux pont dont la largeur fut portée en 1838 ; de 5 à 7 mètres (5). Enfin sur la Moisie, en bas de la côte de Saint Phlin, un ponceau édifié en 1851 : à la fois nécessité, car la Moisie était méchante en cas de grosse pluie, et œuvre sociale « pour fournir du travail à la classe ouvrière trop souvent inoccupée » (5) Enfin, le conseil municipal sollicité en 1838 pour l’établissement d’un pont à Tomblaine, donna un avis défavorable à ce projet : « on ferait beaucoup mieux de construire un ouvrage à Bosserville à l’emplacement du bac, il serait utile à une dizaine de communes pour rejoindre la route royale de Paris-Strasbourg » (5). Cet avis ne fut point pris en considération. Mais un siècle plus tard, un pont fut jeté par l’Autorité militaire, un peu en aval du bac des chartreux, comme « passage stratégique ». A ce pont en bois succéda, édifié par le Génie, une passerelle qui existe toujours. Endommagé pendant la dernière guerre, l’ouvrage fut interdit et momentanément doublé d’un bac : ce n’est pas sans quelque appréhension que l’on empruntait cette « nef » métallique exploitée par la famille Potard (6). Rendue depuis à la circulation, la passerelle permet aux piétons et aux « deux-roues » de gagner rapidement Laneuveville.  
4. Monographie Maillard
5. Registre des délibérations du Conseil Municipal
6. Souvenir personnel de l’auteur. Le jour des vacances, l’embarcation était plus que surchargée par des séminaristes fuyant vers la liberté !
Le Village au fil des siècles

L’histoire ne commence vraiment qu’à partir du VIII e siècle, avec un document de l’an 770 qui cite le lieu sous le nom d’Arcas : «Arcas in pago Calvomontense » (1). Non loin  du pont était « la ville » qui comportait quelques habitations autour de l’église, une tuilerie (ou « chauffour » située sur la montagne de Saint-Phlin, en haut de la rue de Lorraine appelée autrefois « rue du Chauffour »….

Il y avait aussi des moulins dont l’existence est signalée dans des actes des XIIè et XIIIè sicècles…..

De l’an mil à la révolution, le territoire dut propriété de plusieurs communautés religieuses, et c’est grâce aux actes de ces dernières que l’on peut repérer l’existence du village au cours des siècles……

Le village à fort souffert du fait des guerres successives dont la Lorraine fut le théâtre, du fait des fléaux naturels tels que pestes, famines, inondations : ainsi la crue du 2 janvier 1880 fit monter l’eau jusqu’à 3 mètres 20 au-dessus de l’étiage (2). Tous ces malheurs décimaient la population qui, comptant 42 « conduits » (3) en 1633, n’en comptait plus que 6 en 1643 ….Plus près de nous, en  1871, Art-sur-Meurthe, à l’instar des autres communes, subissait les exigences des prussiens victorieux (4).

Dans chaque famille, comme partout ailleurs, les enfants naissaient nombreux et, hélas, mouraient de même. La matrone, qui présidait aux naissances, ne chômait pas d’intérêt : le 25 janvier 14778, Marie-Anne Mainville était élus matrone « par l’assemblée des femmes, à la pluralité des suffrages, et prêtait serment entre les mains du curé » (5)…

Les habitants répondent au vocable d’Arcquois : une façon comme une autre de rappeler l’ancien nom du village. Est-ce parce qu’ils ne montraient, dans les foires et les fêtes du voisinage, particulièrement conscients d’être du « beau village » que les arcquois avaient autrefois mérité le surnom quelque peu irrévérencieux de « Haut-la-queue » ? …..

 

  1. Les Commune…,t. I, p 45 »Chaumontois » : ancien nom d’une vaste contrée (« pagus ») qui allait des Vosges à Nancy)
  2. Registre des délibérations du Conseil municipal
  3. Op. cit. Un « conduit » est un ménage
  4. Chronique du WIX siècle
  5. Registres paroissiaux
Bosserville

La Chartreuse a fait connaître, dans toute la France et au-delà des frontières, ce hameau situé à deux kilomètres d’Art-sur-Meurthe sur la route de Tomblaine.

Ce lieu présente, lui aussi, des titres d’ancienneté ; dès 980, on trouve cité sous le nom de Losseivilla » (1). C’était à l’époque, une seigneurie qui a donné son nom à quelques personnages : des actes du Moyen-Age mentionnent, en effet, un « Jean, seigneur de Bosserville ». En 1136, l’évêque de Toul Henri de Lorraine dut contraindre le chevalier Henri de Bosserville à restituer à l’abbaye de Bouxières la terre de Bosserville qu’il occupait indûment…..

La terre de Bosserville, qui appartenait « depuis toujours » aux Dames de Bouxières, devient, à la fin du XVè siècle, terre ducale. En 1508, René II la donnait à son « écuyer tranchant », Galiot de Lisseras, et Bosserville allait demeurer en cette famille jusqu’en 1636.

Les lisseras y avaient construit un petit château et dépendances, et fondé une église paroissiale. Comme certains Lenoncourt, auxquels ils étaient d’ailleurs apparentés, Galiot de Lisseras ayant épousé la petite-fille de Colard de Lénoncourt, les Lisseras étaient fidèles à leur souverain, le duc de Lorraine. Fidélité que le roi Louis XIII fit payer en rasant le château et en confisquant la terre de Bosserville : en effet, Claude de Lisseras, le dernier mâle de la famille, capitaine des Gardes de Charles IV, avait suivi son prince à Besançon, Claire de Choiseul, la veuve de Claude, devait ensuite récupérer Bosserville pour quelques temps, avant que le duc ne reprît le domaine pour finalement l’offrir aux chartreux en 1666 (2).

Arrivant à Bosserville, les chartreux ont trouvé un terrain vague, mais, n’étant pas manchots, ils ont laissé, à la Révolution, une riche exploitation. Ils avaient créé un grand potager, planté des vergers et des vignes, installé un chauffour qui a subsisté jusqu’au XIXè siècle. …

Il y avait à Bosserville une cure, dépendant des Dames de Bouxières : elle a duré jusqu’en 1684….. Au nombre des curés de Bosserville, on trouve Jean de Viterne, décédé en 1627 et inhumé à Lenoncourt où il à son épitaphe (3). Le dernier curé nommé par les Dames s’appelait jean Pageot : avant de mourir en 1680, il avait dû se résigner à la suppression de sa charge. En effet, dès leur arrivée, les chartreux n’eurent de cesse de supprimer et la cure et l’église : l’église parce qu’il fallait l’emplacement, la cure parce qu’elle était illégale et inutile…….Mais c’est seulement en 1681 que les Dames cèdent aux Chartreux « les dixmes et collations de la cure » et c’est en 1684 qu’est consommée la disparition de la paroisse de « ce hameau qui n’a jamais eu pour habitants que quelques fermiers, domestiques et commensaux des seigneurs. Néanmoins, les prêtres desservants la chapelle y érigée, sous l’invocation de saint remy et le patronage des Dames de Bouxières, n’avaient pas laissé de prendre la qualité de curés contre les dispositions très expresses des règles canoniques qui veulent qu’en chaque paroisse il y ait au moins dix familles et que celles où le nombre ne s’y trouve pas complet soient supprimés » (4). Toujours en 1684, les vestiges de la petite église disparaissent définitivement grâce à l’autorisation accordée au chartreux de « faire démolir ce qui reste de l’ancienne chapelle servant autrefois d’église paroissiale, transférer les fonts baptismaux, ensemble des ossements des trépassés en la nouvelle qui sera bâtie nécessairement à leurs frais » (4).

Cette ordonnance épiscopale, datée du 25 avril 1885, fut observée puisque les chartreux firent bâtir une nouvelle chapelle, à l’entrée de l’avenue, au bord de la Meurthe. Pour ce lieu de culte réservé à leur personnel, « les Pères chartreux supplient sa Sainteté de leur accorder grâce de prendre à leur choix un curé du voisinage ou un prêtre approuvé par l’Ordinaire pour administrer à leur fermiers, domestiques et ouvriers les sacrements » (4).

A la révolution, l’édifice fut acquis par un particulier. Aujourd’hui la chapelle est toujours là, mais n’a jamais été rendue au culte.

 

Dernier détail intéressant à noter à propos de Bosserville : l’ermtiage Sainte Marguerite, situé à la limite des territoires de Bosserville et de Tomblaine. C’est là, dans une maisonnette, propriété des Cordeliers, que choisit de vivre le célèbre reclus Pierre Seguin. Pendant six ans, de 1599 à 1605, le saint homme exhorta, de sa fenêtre, ses nombreux visiteurs à mener vie chrétienne. Mais les crues de la Meurthe rendant l’accès difficile, on fit quitter à l’anachorète les bords de la rivière pour les bords du ruisseau de Nabécor, sous Vandoeuvre, en un lieu sauvage où il allait vivre trente ans (5). Ainsi, Bosserville fut la première résidence de cette célébrité venue de Senlis.

 

 

 

1.Les communes…., t. I, p. 174
2.Notre ouvrage « Lenoncourt en Lorraine », p 57.
3.« Lenonocurt en Lorraine », p 70.
4.Archives M.-et-M.. H 721
5.Pfister. Histoire de Nancy, t. II, pp. 985-987. Pierre Seguin, né à Senlis en 1558, est décédé à Nancy le 1er août 1635.
Saint-Phlin

On appelle ainsi l’écart situé à un petit kilomètre au sud d’Art-sur-Meurthe, sur la hauteur, non loin de Varangéville. Saint Phlin est une autre façon de dire Saint Félix. …

Précisément, Saint-Phlin appartenait à l’abbaye Saint-Clément de Metz. En 1526, on trouve dans les actes de cette communauté « l’admodiation pour 92 ans, par Gérard de Haussonville, administrateur de l’abbaye, à noble homme Collignon, d’un gagnage sis à Saint-Phélix près Saint Nicolas et des dîmes d’Art-sur-Meurthe dépendantes dudit gagnage » (1)

Mais début XVIIe, Saint-Phlin va changer de propriétaire et, de messin, devenir nancéien, avec la création de la Primatiale de Nancy…..Sitôt créé, la chapitre primatial se préoccupa  de posséder près de Nancy, d’où, entre l’abbaye Saint-Clément et le Chapître, l’échange de Saint-Phlin contre le «ban Saint-Martin » dont Charles III avait doté la Primatiale. L’acte est du 25 juin 1604 entre « messire Dominique Husson, prestre prébendé en Insigne Eglise Primatiale de Notre-Dame de Nancy, et Révérend Père en Dieu François de Villers, abbé de Saint-Clément de Metz » (2). Ratifié par le Roi en décembre, la transaction était confirmée par le Pape Paul V en juin 1605.

…..en 1704, on trouve dans les comptes de la Primatiale des dépenses pour réparer la maison du chapître (3). En 1470, la chapelle Saint-Félix doit être reconstruite : l’opération est financée moitié par le chapître et moitié par « Damoiselle des Armoises, vu que c’est le feu le chanoine des Armoises qui a pris l’initiative de cette restauration. (4)

En 1758, la chapelle se présente ainsi : « Dans un coing de la grande cour attenant au corps de logis, il y a une petite chapelle où pose limage de saint phlin, elle a pour fermeture un mur à hauteur dapuit dans lequel on a pratiqué une porte……Le volet de la porte est en planches de sapin……, le fond de ladite chapelle se trouve briqué et tous les murs au pourtour se trouvent en bon état de même que la charpente couverture et la chalatte »(4) L’édifice actuel correspond en gros à cette description : il pourrait donc dater de 1740, époque de la restauration faite par le chanoine des Armoises.

Une grosse ferme occupe le « sommet » et domine la vallée de la Meurthe : endroit rêvé pour un château ! En fait, il n’y eut jamais que la « cense-fief » avec son oratoire où l’on célébrait aux fêtes de Saint Clément et de Saint Félix.

Saint-Phlin est aujourd’hui parfaitement ignoré, mais il n’en fut pas toujours ainsi : le lieu connut jadis son heure de célébrité en raison d’une fontaine « miraculeuse » dont l’eau avait, paraît-il, propriété de dispenser du recours au médecin. « Un enfant tombait-il malade ? Vite sa mère prenait sa petite chemise et allait la plonger dans la fontaine : si la chemise surnageait, l’enfant devait se rétablir, sinon c’était la mort certaine…….

Aujourd’hui, la fontaine  sert à abreuver l’abondant  bétail de l’exploitation, tandis que la chapelle est toujours là, privée de culte mais témoin du passé.

….

1.Archives de M.-et-M. H. 644
2.Archives de M.-et-M. G. 521
3.Archives de -et-M. G. 745
4.Archives de M.-et-M. G. 458

 

Nous tenons le livre à la disposition de ceux qui souhaiteraient le consulter.